De 1934 à 1942, la Société de construction des Batignolles, qui avait mené à bien les travaux du chemin de fer de Brazzaville à l'océan, ou « Congo-Océan » devait s'employer à construire le terminus de cette ligne : le port en eau profonde de Pointe-Noire.
L'idée de l'établissement d'un port remontait à la fin du XIXesiècle. Dès 1883, la mission du lieutenant de vaisseau Robert Cordier, sur le Sagittaire, avait dressé le relevé de la baie de Pointe-Noire (le nom de Pointe-Noire est dû à la composition du sous-sol, formé de grès tendres, le débris de coquillages et imprégné de bitume à certains endroits).
Dès 1895, Savorgan de Brazza s'était efforcé de convaincre la France de la nécessité d'un chemin de fer au Congo. Le problème du débouché à la mer de ce dernier était naturellement posé, mais le projet demeura à l'écart jusqu'en 1909, date à laquelle fut voté un emprunt d'équipement de l'Afrique équatoriale française qui prévoyait la réalisation de la voie ferrée et d'un port.
Pour résoudre la question du terminus maritime du chemin de fer, la Mission hydrographique du Gabon fut constitué et placé sous les ordres du lieutenant de vaisseau Audouin. Elle avait pour instruction de rechercher vers le sur du Gabon, dans la région qui s'étend des environs de Loango d'une part, jusqu'à ceux de Pointe-Noire, d'autre part, le point le plus propice à l'établissement d'un port (instructions du Gouverneur général Merlin, du 4 mai 1910).
Une reconnaissance générale fut effectuée sur la partie de la côte de l'embouchure du Kouilou à celle de Loémé. Dès la fin 1910, le rapport d'Audouin arrêtait son choix sur les baies de Loango et de Pointe-Noire.
La mission accomplit ses travaux d'août 1910 à janvier 1911 et établit une carte au 1/10.000ede la baie. Un projet de port fut établit par le lieutenant Viant ; il comprenait la réalisation d'une digue de 2400 m et de 2300 m de quais ; le port pourrait recevoir des navires de II m de tirant d'eau.
Un avant-projet fut présenté par la Société de construction des Batignolles et soumis au Conseil supérieur des travaux publics du ministère des colonies. La guerre interrompit ces projets, peu après le vote d'un emprunt du 13 juillet 1914 pour la construction du Congo Océan.
En 1918, tout était à reprendre : on avait quelque peu oublié les travaux des missions précédentes : de 1918 à 1920 le capitaine de corvette Hautefeuille, sur leRégulus, fut chargé de trouver sur la côte Congolaise « un point d'aboutissement pour le chemin de fer projeté entre Brazzaville et l'Atlantique ». La mission hydrographique de l'Afrique équatoriale française, sous les ordres du lieutenant de vaisseau Lafargue, un ancien de la mission Audouin, explora sur le vapeurHaoussala côte sud du Gabon et projeta la construction d'un port à Ponite-Banda.
Ces multiples recherches, les hésitations des autorités sur le choix d'un terminus pour la ligne ne manquait pas d'irriter un grand nombre de gens. Le gouverneur général Augagneur, lassé par ces atermoiements, décida de hâter les réalisations : le 6 février 1921, il inaugurait le début des travaux de la ligne; quatre mois plus tard, il imposait le choix de Pointe-Noire comme terminus sur l'océan.
Cependant il fallut encore attendre pour voir commencer la construction du port.
En 1931, l'activité du port, muni d'un wharf en béton armé o? accostaient des chalands qui assuraient les opérations de chargement et de déchargement des navires ancrés dans la baie, était encore assez réduite.
Les études du port en eau profonde furent effectuées en 1928 par l'ingénieur des Ponts et chaussées T.P. Blosset ; le projet comprenait, outre la réalisation d'un port de batelage, la construction d'une digue extérieure de protection de 1900 m de longueur enracinée au sur ouest de l'extrémité du cap, la construction d'un mur de quai de 750 m de long et la construction d'un môle entre la digue et le quai. L'ensemble était estimé à 300 millions.
Le projet fut mis au concours et inséré dans leJournal officieldu 4 octobre 1931. Les candidats éventuels devaient se faire connaître avant le 15 décembre 1931. Les concurrents agréés remirent leurs propositions le 30 novembre 1932. Après examen des projets et diverses tractions au cours de l'année 1933, la situation était la suivante, deux groupes étaient en concurrence :
le groupe de la Société de construction des Batignolles qui comprenait, outre celle-ci, la société des grands travaux de Marseille, les sociétés Schneider, Hersent et Fougerolle, la société générale d'entreprises, la Compagnie des colonies, la banque de l'union parisienne.
le groupe de la société nationale de travaux publics (groupe Sillard) qui réunissait autour de cette dernière la société française d'entreprises de dragages et de travaux publics et la régie générale de chemins de fer et de travaux publics.
Le problème essentiel constitué par la recherche de matériaux pour la digue : le groupe Sillard proposé la construction d'un canal pour transporter du Kouilou à Pointe-Noire la pierre extraite; la société des Batignolles, de son côté avait découvert une carrière au kilomètre 102 (carrière de Sarae) de la voie du chemin de fer du Congo Océan; le projet du groupe Sillard, fut rejeté. Les Batignolles signèrent le 2 mars 1934 le marché pour la construction du port en eau profonde de Pointe-Noire.
Le 10 juillet 1934, le Gouverneur général Antonetti inaugurait la voie ferrée Brazzaville-Pointe-Noire; le lendemain, il posait la première pierre du futur port. « Au cours des cinq années qui précédèrent la guerre de 1939-1945, presque toute l'activité de Pointe-Noire fut polarisée par la construction de son port en eau profonde » (Pierre VENNETIER,op. cit, p. 276).
Pendant deux ans le chemin de fer devait servir au transport de la pierre des carrières ouvertes au kilomètre 72 et au kilomètre de la ligne. 200 000 tonnes ainsi transportées ; une drague suceuse installé dans le port fournit 2 300 000 mètres cube de remblais pour les terre-pleins.
Le perré C fut achevé au mois de juin 1936 ; la cale de halage put être terminée un an plus tard, ainsi que le quai de batelage qui entra en ami 1938 après avoir été pourvu de grues. En juillet 1938, la digue extérieure était achevée et le 1er avril 1939 le premier navire, le Foucault accostait à Pointe-Noire. La digue intérieure ne devait être complètement achevée qu'en 1942.
