Après la fin de la première guerre mondiale et le mouvement du 4 mai 1919, nombreux sont les jeunes Chinois sans fortune qui viennent en France dans l'espoir de faire des études qu'ils financeraient eux-mêmes par leur travail. Ils y sont encouragés par la SEFC, fondée en 1916 et présidée par A. Aulard, professeur à la Sorbonne, et par Cai Yuanbei, recteur de l'Université de Pékin : c'est le "mouvement études-travail" (qingong jianxue yundong).
Malheureusement, le chômage sévit et les étudiants-ouvriers ne trouvent pas dans les usines le travail qui leur permettrait de se constituer un pécule en vue de leurs futures études. La SEFC doit alors les placer à ses frais dans des écoles, ce qui lui crée rapidement des difficultés financières insurmontables.
Dès février 1921, elle ne peut plus faire face à ses engagements et cesse de payer les établissements d'enseignement [après 1921, la SEFC, située 39 rue de la Pointe à La Garenne-Colombes, continue néanmoins d'exister. Elle s'occupe encore des étudiants-ouvriers restés en France, leur sert de boîte aux lettres et de domiciliation pour certains journaux, mais, de manière générale, n'assure plus leur subsistance]. Huit cents à mille jeunes Chinois, privés de toutes ressources, viennent manifester à la Légation de Chine à Paris, laquelle est dès lors contrainte de prendre en mains la situation : elle contracte auprès de la Banque de Paris et des Pays-Bas un emprunt, qui lui permet de subvenir momentanément aux besoins des jeunes Chinois les plus démunis, en leur versant une allocation journalière de 6 francs. Une partie des archives ici répertoriées est constituée par des reçus de ces allocations, signés par les étudiants-ouvriers (partie E du catalogue).
Il ne pouvait toutefois s'agir que d'un remède provisoire : le chômage persiste et les emplois dans l'industrie restent très rares. C'est alors que s'impose sous l'impulsion d'Eugène Bradier, consul de France, inspecteur des étudiants chinois, l'idée d'un Comité franco-chinois de patronage, qui regrouperait toutes les bonnes volontés, ferait appel, à côté de financements publics chinois et français, au financement privé et jouerait en outre le rôle d'office de placement grâce à ses liens avec les grandes industries françaises.
Association régie par la loi de 1901, le CFC se donne pour objet, à sa fondation, "le patronage des jeunes Chinois venus en France pour y parfaire leur instruction générale, technique ou professionnelle, dans des entreprises et établissements industriels, commerciaux, agricoles, miniers et d'enseignement". Il doit en outre s'efforcer d'assurer l'accès de ces mêmes établissements aux étudiants-ouvriers chinois. Le CFC est placé sous le haut patronage des gouvernements français et chinois et de diverses personnalités des deux pays, parmi lesquelles on relève les noms de Paul Painlevé et d'Edouard Herriot. Les statuts du CFC prévoient au conseil d'administration une participation égale des représentants des principaux ministères français, et des diplomates chinois en France.
A côté des personnalités officielles, le CFC réserve également dans son conseil une place importante aux principales banques et aux grandes sociétés industrielles françaises, intéressées au développement des relations avec la Chine. Il compte sur ces dernières à la fois pour financer ses activités et pour faciliter l'accès des jeunes Chinois au monde du travail. Tcheng Loh (Chen Lu), alors Ministre de Chine à Paris, assure la présidence, mais la responsabilité effective du CFC revient pendant de longues années à Eugène Bradier. Grâce aux fonds accordés par les gouvernements français et chinois et par quelques sociétés comme la Banque de l'Indochine et la Compagnie générale d'Extrême-Orient, le CFC assure le règlement des sommes dues aux établissements d'enseignement par la SEFC. S'il maintient aussi pour quelque temps l'allocation journalière accordée précédemment par la Légation, il doit y renoncer à partir d'octobre 1921 et se contente dès lors d'accorder quelques bourses aux étudiants considérés par lui comme les plus méritants, tout en aidant la grande masse des autres à trouver des emplois dans l'industrie et en favorisant le rapatriement des malades et de ceux qui en font la demande. De cette époque du Comité datent les reçus rédigés en français (partie E du catalogue : juillet-octobre 1921) et la plus grande partie de la correspondance avec les écoles et les entreprises (parties B et C). Bien que la situation des étudiants-ouvriers restés en France demeure très précaire, le CFC considère, en février 1922, que la période la plus critique est passée, puisqu'à partir de cette date on n'encourage plus à venir en France qu'une élite d'étudiants préalablement sélectionnée.
Dès lors la vocation du CFC se transforme. Il décide de fusionner avec l'Association amicale franco-chinoise fondée en 1906. Les buts de la nouvelle AAFC diffèrent de manière significative de ceux de l'ex-CFC. Désormais l'accent est mis sur le patronage d'une élite d'étudiants chinois et sur les relations amicales franco-chinoises. L'AAFC continue néanmoins son assistance aux étudiants-ouvriers dans leur recherche d'un emploi. Elle poursuit son existence nominale jusqu'en 1940, se consacrant principalement dans cette dernière période au Cercle franco-chinois.
